L’INRS découvre un outil génétique inédit ciblant l’ADN simple brin
Une équipe de recherche du Québec dirigée par le professeur Frédéric Veyrier a identifié une famille d’enzymes capables de couper spécifiquement l’ADN simple brin. Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives pour la biotechnologie et la médecine de précision.
Une avancée majeure après CRISPR
La technologie CRISPR a marqué une révolution dans le domaine de la génétique en permettant des coupures ciblées dans l’ADN double brin. Elle a offert aux chercheurs la possibilité de modifier des gènes avec une précision sans précédent, notamment dans des cellules végétales, animales et humaines. Toutefois, l’édition génétique de l’ADN simple brin demeurait, jusqu’à présent, un défi non résolu.
C’est dans ce contexte que s’inscrit la percée du professeur Frédéric Veyrier et de son équipe de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS). Les chercheurs ont découvert une nouvelle famille d’endonucléases, baptisée Ssn, qui cible spécifiquement l’ADN simple brin – une première mondiale. Leurs résultats ont été publiés dans Nature Communications, soulignant l’importance de cette innovation pour la recherche fondamentale et les applications biomédicales.
L’ADN simple brin, un terrain à explorer
Contrairement à l’ADN double brin plus connu, l’ADN simple brin (ADNsb) est généralement observé dans certains virus ou au cours de processus comme la réplication et la réparation cellulaires. Il est aussi largement utilisé dans des technologies telles que le séquençage, le diagnostic moléculaire ou les nanotechnologies.
Or, jusqu’ici, aucune enzyme naturelle ne permettait de reconnaître et de couper de façon ciblée une séquence d’ADNsb. L’absence d’un tel outil représentait un frein important pour plusieurs innovations.
Grâce à des travaux menés au Centre Armand-Frappier Santé Biotechnologie de l’INRS, l’équipe a réussi à isoler et caractériser cette nouvelle famille d’enzymes Ssn, appartenant à la superfamille GIY-YIG. Plus précisément, les chercheurs se sont penchés sur une enzyme présente chez la bactérie Neisseria meningitidis, mieux connue sous le nom de méningocoque.
Une découverte aux implications génomiques
« Nous avons découvert que cette enzyme reconnaît une séquence bien précise, présente à de multiples reprises dans le génome de la bactérie, et qu’elle joue un rôle essentiel dans sa transformation naturelle. Elle influence directement la dynamique de son génome », explique le professeur Veyrier, spécialiste en bactériologie génomique et évolution.
Outre cette enzyme spécifique, les chercheurs ont identifié des milliers d’enzymes analogues dotées de la capacité de reconnaître et de couper leur propre séquence d’ADN simple brin. Cette diversité offre un immense réservoir de possibilités pour des applications ciblées.
« Ces enzymes possèdent leur propre spécificité et peuvent devenir des outils sur mesure pour la recherche et les biotechnologies », ajoute Alex Rivera-Millot, co-premier auteur de l’étude.
De nouvelles avenues pour la biotechnologie et la santé
Les applications potentielles de cette découverte sont vastes. Sur le plan médical, ces enzymes pourraient :
• améliorer les techniques d’édition génétique de haute précision;
• contribuer au développement de tests de diagnostic plus sensibles;
• être intégrées à des plateformes de détection de pathogènes ou de ciblage thérapeutique.
En biologie moléculaire, elles pourraient servir à mieux comprendre les mécanismes de réplication virale ou de réparation de l’ADN. Les outils développés pourraient aussi être adaptés à des environnements industriels ou à des procédés de bio-ingénierie.
Un brevet est en cours de dépôt pour protéger cette découverte et permettre son transfert technologique.
Une publication reconnue et un appui financier solide
L’étude intitulée Discovery of the widespread site-specific single-stranded nuclease family Ssn est cosignée par M. Chenal, A. Rivera-Millot, L.B. Harrison et leurs collègues. Elle est parue dans la revue Nature Communications (avril 2025).
Le projet a été soutenu par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) et le Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS).
À propos de l’INRS
L’Institut national de la recherche scientifique (INRS) est un établissement universitaire québécois spécialisé en recherche et en formation aux cycles supérieurs. Il regroupe quatre centres multidisciplinaires, dont le Centre Armand-Frappier Santé Biotechnologie, et se classe au premier rang canadien en intensité de recherche. Il contribue depuis plus de 50 ans à l’innovation scientifique et au développement socioéconomique du Québec.
Source : Institut national de la recherche scientifique / CNW
Publication Index Santé : 2025-04-14
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